La lecture dans sa fonction la plus haute parce que la plus humaine, est toujours la rencontre de deux paroles : la parole fixée par l’écriture et la parole intérieure du lecteur. Que cette rencontre ne se produise pas, la compréhension n’est que notionnelle. Si bien qu’écrire c’est tirer du plus profond de soi une parole afin qu’elle puisse se mêler aux courants incessants de paroles intérieures en autrui. Il y a peu de lecteurs, car le grand nombre refuse cette intrusion et se tient à la surface. Car il y a péril de voir sa vie bouger. D’ailleurs depuis longtemps beaucoup ont muré à jamais le puits des abîmes. Qu’ils reposent en paix.
Jean SULIVAN, Petite littérature individuelle, 1971