Comment écrire, au temps des catastrophes ? Quelle littérature est encore possible ? Elias Canetti – dans un essai qu’il dédie au journal du Docteur Hachiya d’Hiroshima, se demande ce que signifie survivre à une catastrophe d’une telle ampleur; et il répond qu’on ne peut s’en faire une idée qu’en lisant un texte qui, comme les notes de Hachiya, se caractérise par la précision et le sens de la responsabilité. « S’il n’était pas absurbe, écrit Canetti, de se demander quelle forme de littérature est indispensable aujourd’hui, je dirai: celle-ci ». [W.G.Sebald, De la destruction comme élément de l’histoire naturelle].
Aujourd’hui, après Tchernobyl, après Fukushima, quelle littérature est encore légitime ? quelle forme d’écriture peut encore être considérée comme indispensable ? Je ne suis pas loin de penser, comme Canetti, que c’est le sens de la responsabilité qui en est le sceau. Mais, à la précision, j’ajouterais: la colère et l’urgence. Le récit de Svetlana ALEKSIEVITCH, La supplication, Tchernobyl – Chronique du monde après l’apocalypse, est de cette trempe-là.