J’emprunte à Jean SUR: Tout le monde sait qu’il faudrait commencer à parler sérieusement et que personne ne voudra le faire. Il ajoute, plus loin – ou ailleurs: Les intuitions fortes s’expriment rarement de façon paisible …
J’aime considérer que, bien en amont des techniques, des méthodes, du temps, … il faut vouloir chercher ce qui fonde la pratique, vraiment. Pour moi, ce qui est premier : la posture du musicien, de l’artiste. La « culture » de ce type de pratique est bien moins développée en France, par arrogance imbécile, que dans d’autres pays, où la pratique musicale est infiniment mieux reconnue, … La démonstration (extrême, je vous le concède) en est faite ici.
Je revendique donc de prendre notre pratique artistique au sérieux.
Depuis des années, je ne veux plus travailler qu’avec des gens qui prennent au sérieux leur pratique musicale, qui la reconnaissent pleinement pour ce qu’elle est, qui apprennent donc à la connaître, qui en acceptent les contraintes, … avec soin, avec modestie, avec attention, avec dévouement, avec patience, avec la volonté de grandir, avec la folie de qui s’attaque à un projet jamais fini, jamais achevé, … Ce que je considère comme la posture de l’artiste véritable.
Si l’artiste véritable paraît distrait, c’est qu’il est concentré: tout entier tourné vers ce centre vers quoi il ne cesse de se diriger, vers ce centre où il parvient à se tenir parfois, mais vers lequel il doit sans cesse faire effort pour retourner parce que ce centre, sans cesse, se dérobe.
François DEBLUË, in Conférence n° 32, p. 20