La question de l’excellence, dans un projet artistique, se pose dès l’abord. Elle fait peur aux amateurs, et pourtant – j’ai l’occasion d’y revenir par ailleurs, notamment dans Une perfection absolue – elle ne cesse pas d’être d’actualité.
Mais que veut dire une pratique d’excellence ?
Elle se fonde sur une double mesure, une double appréciation.
D’un côté, une appréciation objective – un regard, une écoute, extérieurs. C’est donc une mesure qui se réfère à d’autres pratiques, qui les compare entre elles, sur l’échelle de l’existant, mais dont les critères sont extraordinairement variables. Dans la discipline qui nous occupe – la pratique vocale – c’est à la fois, ou distinctement, la qualité et l’originalité du répertoire, la façon de se présenter en chœur, la vocalité, la liberté du souffle, la sonorité, la cohérence, mais aussi la clarté, l’ouverture, la sensibilité de l’interprétation, la force de conviction, …
D’un autre côté, une mesure subjective: comment je me situe moi-même dans ma pratique, à quel niveau je m’y place. En d’autres termes: quelle place est-ce que je lui accorde ? Cette appréciation est dynamique: c’est aussi une ambition, elle se nomme, se détermine comme une ambition. Mais je ne parlerai pas ici de « progrès », le terme me semble nous renvoyer à une échelle objective. L’ambition individuelle s’inscrit plutôt comme un mouvement, et un mouvement de l’intime.
Je considère que l’excellence se situe d’abord dans ce mouvement. Il est à la portée de tous, mais … , à l’instar du moine-voyageur, Bashô – dans Le chemin étroit vers les contrées du Nord, p. 50:
(…) je me disais qu’en toute chose l’excellence est le fruit d’efforts auxquels l’homme ordinaire ne consent pas.