J’ai noté, il y a bien des années déjà, ce très beau texte de Philippe JACCOTTET [extrait de Notes nocturnes]. Il éveille un écho: les Poteaux d’angle de Michaux. J’aime l’idée de ces piles sur lesquelles s’appuyer, de ces poteaux auxquels on s’adosse. Nos découvertes – de lecteurs, d’auditeurs, d’artistes – sont progressivement remplies de ces poteaux. Ils forment, petit à petit, une véritable forêt.
Adossé, vermoulu,
à ce pilier à peine moins précaire,j’aimerais ne plus délivrer que des paroles
qui éparpillent les toits
(car même un toit de paille pèse trop
s’il vous sépare du rucher nocturne).Des paroles pareilles
aux actes des fleurs, bleus ou rouges,
à leur parfum.Je ne veux plus des labyrinthes,
même pas d’une porte :juste un poteau d’angle
et une brassée d’air.Déliés les pieds, délié l’esprit,
libres, mains et regards :alors, le deuil nocturne
est entamé par en bas.