Routes

Suivre un trajet est, je crois, le mode fondamental que les êtres vivants, humains et non humains, adoptent pour habiter la terre. (…)

Chez les Inuits, il suffit qu’une personne se mette en mouvement pour qu’elle devienne une ligne. Pour chasser un animal, ou retrouver quelqu’un qui s’est peut-être perdu, les Inuits tracent une piste linéaire dans l’étendue et se mettent en quête d’indices menant à une autre piste jusqu’à atteindre le but recherché. Le pays entier est donc perçu comme un entrelacs de lignes et non comme une surface continue.

Tim INGOLD, Une brève histoire des lignes, Z/S

Les routes aux États-Unis suivent souvent le tracé d’anciennes pistes indiennes, et même certaines rues des grandes villes dont Broadway est l’exemple le plus célèbre. (…) Les Américains ont d’ailleurs ce qu’on peut appeler une « culture » de la route qui nous est inconnue en Europe (…). Il semblerait (…) que les grands sentiers de migrations indiens étaient tracés par les bisons. Les Indiens de toutes façons se déplaçaient beaucoup et facilement : ils pouvaient se dérouter au moindre prétexte — la visite d’un ami, une fête, un raid sur un village voisin. Les sentiers étaient de différents types avec des fonctions précises : celui qui mène aux champs, celui qui conduit au monde extérieur et puis aussi le fameux « sentier de la guerre » qui existait vraiment.

Gilles A. TIBERGHIEN, Notes sur la nature, la cabane et quelques autres choses

Voir aussi, sur une autre page, Mémoires indiennes.

Retour à Torgau

Juin 2012. Je reviens à Torgau (Saxe). J’y étais au début de l’hiver précédent et j’avais eu envie de venir en été, revoir la vieille ville, le château, les bords de l’Elbe, le paysage de bois et de champs à perte de vue.

Jeudi matin. La route par Anvers, Eindhoven, Venlo aux Pays-Bas, puis Dortmund et Kassel; enfin Göttingen. Une étape.

Jolie ville, je m’y sens totalement dépaysé déjà. L’Université, quelques maisons anciennes assez remarquables, des clochers. Plusieurs bouquinistes et libraires d’ancien, auprès desquels il reste possible de faire des trouvailles. C’est bon signe. La ville universitaire alimente ce fonds, plein de petites curiosités.

Vendredi matin. La route vers l’Est. Je choisis de ne pas prendre l’autoroute et de traverser le Harz: collines, bois et landes à perte de vue, villages essaimés, maisons anciennes. Je m’arrête devant le château de Harzgerode. Le temple évangélique est immense et clair, avec trois étages de galeries qui en font un véritable théâtre. Je descends les pentes des collines vers la plaine. Longue traversée des bois de pins. Le soir, je suis à Torgau. Continuer la lecture de « Retour à Torgau »