(…) au moment de la plongée l’émotion qui étreint est toujours celle d’un monde entièrement étranger, qui ferme à la fois la bouche et les oreilles et où la peur semble être liée à l’absence de toute possibilité de parler. (…) Le fait que dans l’eau les traces soient vite effacées est en relation avec le silence abyssal. L’effacement rapide du sillage est le signe avant-coureur de l’engloutissement. Pourtant, et par cela même, l’eau, et surtout l’eau immobile et calme, est liée depuis toujours à la mémoire: là où tout est englouti, tout est peut-être intégralement conservé.
Jean-Christophe BAILLY, Le propre du langage, p. 64